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vendredi 21 décembre 2012



PSA Aulnay : « NON à la fermeture »
de Yann DUJARDIN



Depuis le mois de juillet, les ouvriers de PSA Aulnay se battent contre le Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE), mis en place par la direction.

L’annonce de la fermeture de l’usine PSA d’Aulnay-sous-Bois a suscité plusieurs mouvements sociaux à Paris, de l’Arc de Triomphe jusqu'au Palais de l’Elysée. Les syndicats donnent leur témoignage sur un conflit qui concerne la France entière. Ces derniers mois, nombreuses sont les entreprises, comme Sanofi, Doux ou encore l’usine de Florange qui ont annoncé leur fermeture ou leur plan de licenciement. Et nombreuses seront peut-être celles à venir, comme Renault ou Air France.

Il y a un peu plus d’un an, les salariés de PSA Aulnay ont trouvé la note d’intention faisant référence à une fermeture du site et un plan de reclassement. Aucune déclaration officielle sous le mandat Sarkozy n’a été faite, et la direction de PSA avait démenti tout projet de fermeture ou de reclassement. Pourtant, on savait que le secteur automobile européen connaissait une forte crise ces derniers mois, plusieurs constructeurs voyaient leur chiffre d’affaires chuter. Les ventes automobiles avaient reculé de 16 à 17 millions de voitures vendues avant la récession en 2009, à 13 millions en 201
2, et l’industrie automobile européenne était confrontée à une surcapacité de production de 35 pour cent.

Crise mondiale de surproduction

Durant la première moitié de 2012, PSA a perdu plus d’un milliard d’euros. Si l’on prend en compte l’arrêt des ventes du véhicule C3 en Iran, dû à l’alliance avec General Motors, on comprend mieux la violente perte financière de PSA, mais on ne comprend pas que l’on puisse fermer une usine faisant partie des plus récentes, située sur l’axe du futur Grand Paris, avec trois autoroutes proches du site, ainsi que les aéroports de Paris (Roissy CDG étant le plus près). 8000 suppressions d’emplois, reclassement ou pré retraite : c’est le chiffre national annoncé. Quelles seront les solutions proposées par PSA ? L’avenir des 3300 salariés de PSA Aulnay est à la fois incertain et tout tracé. La fermeture annoncée en 2014 peut être repoussée à 2016 si la direction décide de produire, comme il était prévu au départ, les quelques 400 000 C3.
Cette fermeture annonce pour beaucoup de salariés la fin d’une partie de leur vie, de leurs habitudes, leur quotidien, avec les amis et la famille, toutes ces choses qui font que l’on aime son usine et que l’on veut se battre pour elle. PSA et le gouvernement y ont mis un terme rapidement. 


Echec des négociations
 
En effet, le 25 juillet 2012, les syndicats de PSA avaient organisé une manifestation Avenue de la Grande Armée, à Paris, devant le siège social de PSA, pour protester contre le PSE (plan social de l’entreprise) et accueillir l’annonce du plan stratégique de relance proposé par le gouvernement ce même jour.  Puis, le 20 septembre 2012, jour de la réunion tripartite promise par François Hollande à l’Elysée, il n’était rien ressorti de nouveau, si ce n’est que le gouvernement avait clairement acté la fermeture définitive de PSA Aulnay. Une réunion qui sonnait comme un pied de nez de la part de Philippe Varin et du groupe Peugeot envers les salariés et syndicats qui se battaient pour le maintien de leur travail, leur usine, leur vie.
 
À l’heure où le marché mondial automobile connaît des crises importantes, peut-on réellement empêcher autant de licenciements, la faute vient-elle directement des choix économiques du constructeur ou est-ce que la crise serait une fatalité ?

A qui la faute ?
 
Mardi 11 décembre, suite à la conclusion du rapport Secafi concernant la santé financière du groupe PSA, il apparaît que des restructurations sont nécessaires mais on apprend également qu’il reste des zones floues. Ainsi, le groupe PSA annonce à nouveau 1500 suppressions de postes, prévus entre mi-2012 et mi-2014. Une liste de salariés reclassés, licenciés, qui ne rassurera pas le mouvement social à Aulnay. Mouvement qui ne trouve toujours pas l’oreille attentive du gouvernement ou de la direction. La frustration ne fait que grandir et les actions s’en suivent à un rythme soutenu. Certains salariés s’en prennent au matériel, d’autres ont brûlé des pneus lors de la manifestation de Poissy. La direction porte plainte contre les « casseurs », mais qui se plaint de cette casse de l’emploi ?

Sources : leparisien.fr ; le parisien édition papier ; lemonde.fr ; lhumanite.fr ; lefigaro.Fr ; http://www.lepoint.fr/auto-addict/strategie/psa-1-500-departs-en-plus-des-8-000-deja-annonces-11-12-2012-1557650_659.php

mercredi 24 octobre 2012


Klaus Blasquiz, Mélomane Collectionneur

 de Vincent TURBAN



Se définissant comme autodidacte, musicien chanteur, collectionneur de son et d’électricité, notre homme suit un parcours atypique qui détonne dans le microcosme musical français.

Originaire du pays basque, Klaus se retrouve face à un problème de taille : se retrouver avec des potes qui jouent mal ou des gens qui jouent bien mais qui sont des sales cons.

Son initiation musicale débute au milieu des années 60 avec Richard Pinhas (musicien, producteur, compositeur considéré comme l’un des pionniers de la musique électronique) au sein du groupe Blues Convention, qu’il quitte après des divergences artistiques. Il rencontre le batteur Christian Vander par l’intermédiaire du guitariste Claude Engel, et propose à ce dernier de créer une formation. Dilemme : Engel fait déjà partie d’un groupe. Néanmoins, Klaus est invité à venir voir les répétitions, et de fil en aiguille, il devient chanteur du noyau qui allait devenir Magma, nous sommes alors en Septembre 1969.

Chanteur de Magma

Les raisons qui poussent Klaus à s’embarquer dans l’aventure Magma sont les suivantes : musique moderne mais non formatée, musiciens sachant maîtriser leurs instruments, culture musicale riche (Christian Vander fou de Motown, de James Brown, d’Otis Redding, de John Coltrane, d’Igor Stravinsky).

Klaus Blasquiz quitte Magma en 1980 puis participe au cours de la décennie 80 aux albums de Renaud, et du groupe Odeurs. Il rejoint la formation du bassiste Bernard Paganotti en 1986, et dans la foulée il rédige pour le compte du magazine Rock & Folk des chroniques sur le matériel sonore. Parallèlement à ses écrits journalistiques il rédige des ouvrages sur la musique (livre sur la basse Fender) et forme de véritables ingénieurs du son.

Musée du son

Il crée en 2008 son musée du son à St Denis (d’abord installé au 6b puis au Lycée Suger) qui a pour base l’idée suivante : il n’existe pas de lieu ou de collection accessible au public. Klaus est collectionneur oui, mais il évite de posséder toutes les pièces d’une marque (par exemple Fender).

Selon lui, il est important de rassembler des instruments, du matériel hi-fi par exemple, « pour éviter que ça parte à la casse car c’est notre patrimoine technologique, historique, esthétique et sonore ».

Julien Beller, Architecte Utopiste

Vincent Turban

Julien Beller, le président architecte du 6b, nous explique en détail l’historique et la place de ce lieu, désormais incontournable de la vie culturelle dionysienne.

Le 6b, c’est avant tout un lieu doté d’une surface de 7000m2, situé au sein du quartier Gare Confluence. Cette ancienne infrastructure industrielle fut la propriété de la société Alsthom (constructeur de moteurs de bateaux, de trains), qui déserta le bâtiment au milieu des années 90. Celui-ci, par la force des choses, devint une friche industrielle. Julien Beller est arrivé avec ses compagnons il y a 2 ans et demi, 40 personnes au départ qui cherchaient un lieu pour travailler.

  La vidéo de http://regards2banlieue.tv

Friche industrielle devenue lieu de résidence pour artiste

Aujourd’hui 140 résidents (artistes peintres, sculpteurs, musiciens…) sont répartis sur les 7000 m2 de surface. Selon J. Beller, « c’est un lieu de travail partagé (espace de coworking) avec comme questionnement suivant : le vivre ensemble ».

En plus du 6b, La Fabrique à Rêves (jardins loués et mis à disposition des habitants du quartier) voit le jour avec le constat suivant : il n’existe pas d’espace vert dans le quartier. La solution est alors de « faire sortir tous les résidents de l’immeuble, de montrer leurs activités et de créer un lien entre le public et les activités artistiques et culturelles », dixit Julien Beller.


Lagos à St Denis : Femi Kuti & The Positive Force


                                                                                                                         Vincent Turban

Dans le cadre du festival Métis, l’artiste nigérian était de passage le Jeudi 21 juin, jour de la Fête de La Musique, le tout dans une ambiance au beau fixe.

Femi Kuti est le fils de l’illustre Fela Anikulapo Kuti, musicien porte-parole des opprimés et pourfendeur de la corruption et de la dictature qui gangrène depuis plusieurs années le Nigeria. Fela est le créateur du courant musical afrobeat, mix détonnant de musique Yoruba, de jazz et de funk, le tout saupoudré d’un message militant et politique.

La vidéo de http://regards2banlieue.tv

Afrobeat

Cette musique est la plus revendicative du continent africain, et c’est tout naturellement que Femi a  repris l’étendard déployé par son père au début des années 70. Pour revenir au concert, le public est venu nombreux et a vibré au son de l’orchestre Positive Force.

Madame Aurélie Filipetti, ministre de la culture était de passage et était accompagnée de Messieurs Patrick Braouezec (Président de l’agglomération Plaine Commune), Didier Paillard (Maire de la ville de St Denis) et Mathieu Hannotin (Député de Seine Saint Denis).


Concert trop court

Le seul point négatif fut la durée du spectacle (1h30 montre en main) et l’absence de première partie. C’était la Fête de la Musique, et l’audience était désappointée de voir une prestation de qualité, certes, mais si courte. Rajouter 1 ou 2 artistes aurait été bienvenu.


Domisoul, souvenirs d’un audiophile


 Vincent Turban

Personnage incontournable du microcosme soul funk parisien, deejay, animateur radio, audiophile passionné, Dominique Fassio, alias Domisoul est animé d’un indéniable respect pour la culture et la musique afro américaine cuvée 1960-1970, et ce depuis l’an de grâce 1967, année où il commence son apprentissage de DJ.



La vidéo de http://regards2banlieue.tv

Ayant commencé comme vendeur de disques aux alentours de 1970, l’élément déclencheur de sa passion est le concert mythique donné par James Brown et ses fidèles JB’s le 8 Mars 1971 à Paris, sur la scène de l’Olympia. Domisoul se souvient avec exactitude des moindres détails comme la préparation des Soul Brothers dans les toilettes, réajustant avec soin leurs coiffures afro ou leurs costumes trois pièces pour être au top devant le « Godfather of Soul », et les sièges renversés par une formidable marée humaine lors des 3 premiers morceaux du set. Cette prestation est ressentie par notre homme comme une « éruption volcanique » et un des plus gros souvenirs de sa vie.

James Brown, le souvenir de sa vie


En 1995, il fonde avec Blaise Schmitter (alias Wonder B) et Chico C le magazine Funk-U, seul organe de presse entièrement dédié à la Soul, au Funk et au Rhythm’ n Blues, dont le premier numéro est parrainé par Mr Bootsy Collins himself. Grâce à Funk-U, Domisoul chouchoutera et accueillera personnellement des pointures comme James Brown, Bobby Byrd ou Rufus Thomas, ces derniers étant contents de voir que l’on s’intéressait à leur musique et à eux dans une décennie dominée par le hip-hop ou la techno. En parallèle, Dominique devient DJ résident au Cithéa, où il met l’ambiance grâce à ses « mix soul funk afro » et ses soirées devenues légendaires, où se côtoient branchés, noctambules ou employés de voirie venus se détendre après le travail.

DJ aux soirées légendaires

Au cours de ce reportage, Domisoul évoque le manque d’intérêt des grands médias français pour le courant musical soul-funk. Deux phrases résument clairement ce problème : « les radios ont passé « It’s A Man Man’s World » mais le coté funky a été évincé ». La seconde : « les médias français ont toujours ignoré cette musique, c’était pour une autre population qui n’a jamais été respectée par les programmateurs radio ».

jeudi 13 septembre 2012


LES INGREDIENTS POUR UNE BONNE TABLE DU RAMADAN 


                                    Kathalyn Belair Soulac

Durant le mois d’août 2012, période du ramadan cette année, le Secours Islamique a réitéré son action de distribution de repas à tous, jeûneurs et non jeûneurs.

« Je m’investis car je souhaite que les bénéficiaires des repas mangent de bons repas comme une mère les préparent », explique chaleureusement Yamma Oualloun, la responsable cuisine de l’action les Tables du ramadan. Comme elle, une centaine de bénévoles s’activent ardemment tous les jours pendant un mois afin de préparer et servir entre 350 et 650 repas. Ils sont installés depuis le 1er jour du ramadan à Saint-Denis. Dans un espace accueillant, chaleureux et communicatif des plats sont distribués à des étudiants, des sans domicile fixe, la population « Roms » ou encore des travailleurs pauvres… « Les plus démunis ont besoin de manger, mais aussi de se retrouver en société afin d’avoir un contact autre que leur quotidien.  Je suis quelqu’un de très sociable, j’aime aller vers les gens, donc j’ai une facilité à ce niveau-là », confie Moustapha Aassi, bénévole pour la distribution des repas et qui n’a pas hésité à faire le trajet depuis Lille pour donner de son temps. Fort est de constater qu’en dehors de leur profession, les 500 bénévoles font preuve d’une motivation et d’un dynamisme hors pair.

« Nous proposons ce repas, qui est un moment de convivialité, de solidarité en réunissant toutes les cultures, pratiquants et non pratiquants  ainsi qu’un moment d’échange entre bénévoles et bénéficiaires»
Tayeb Benferhat, chargé de projet urgence/insertion et responsable des Tables du ramadan

vendredi 3 août 2012


AUX ARMES ET CAETERA
UN SPLIFF AU GOUT DE GITANE
Vincent TURBAN

Au creux de la vague en cette fin des 70’s et enchaînant les échecs commerciaux malgré des joyaux comme « Melody Nelson » (1971) ou « Vu de l’extérieur » (1973), mais plébiscité par une génération d’artistes comme le groupe Bijou qui reprend « Les Papillons Noirs », Serge Gainsbourg ayant découvert le reggae au milieu des années 70, part trouver l’inspiration en Jamaïque. Flash-back sur la genèse d’un authentique chef d’œuvre de la musique hexagonale.

Le détonateur du projet est la rencontre avec Chris Blackwell, le PDG du label Island qui arrange le coup en le mettant en relation avec la formation Word, Sound And Power (les musiciens de Peter Tosh incluant le batteur Lowell « Sly » Dunbar et le bassiste Robbie Shakespeare) et les choristes de Bob Marley, les I-Threes.

Coup de bluff auprès du patron de Philips, Gainsbourg a les titres de ses futures compositions mais pas de textes. Arrivé à Kingston, l’inspiration vient et en une nuit toutes les paroles sont couchées sur papier. Au niveau rythmique, tout est mis en boîte en 2 jours grâce à la maestria de Sly and Robbie, véritable centrale atomique sonore. Dougie « Radcliffe » Bryan et Mikey »Mao » Chung apportent le tranchant du skank reggae avec leurs guitares, Uziah Sticky Thompson tisse un patchwork de percussions absolument parfait, Ansel Collins et Robbie Lyn apposent un travail de clavier magistral.
 

Chaque note, chaque mesure claque de toute part, les riddims sont concoctés au millimètre près. Le tout est enregistré et mixé dans l’un des meilleurs studios de l’île, le Dynamic Sounds Studios.

Sur cet opus, Gainsbourg ne pratique pas le chant au sens traditionnel du terme, il fait du talk-over (littéralement parler sur la musique). Cette technique vocale est très utilisée dans la musique jamaïcaine et annonce les prémices du rap et du hip-hop, qui apparaîtront aux USA à la fin de la décennie 70.

Au final, l’album fait découvrir les vibrations universelles de la musique reggae dans notre bon vieil hexagone (même si le Roi Marley est passé à plusieurs reprises en France entre 1976 et 1979), malgré les attaques en règle des médias, notamment le billet d’humeur de Michel Droit dans Le Figaro du 1er juin 1979 qui reproche à l’artiste de « propager inconsciemment l’antisémitisme en associant cette parodie scandaleuse, même si elle est débile, avec notre hymne national ». À partir de ce moment, la carrière de Serge Gainsbourg décolle à nouveau.


GOJIRA : L’ENFANT SAUVAGE,
Chronique d’une fin de cycle
Etienne ROSE
 
C’est en ce début d’été 2012 que le groupe originaire de Bayonne GOJIRA décide de sortir son cinquième album, mais avant de continuer, revenons sur un groupe sous médiatisé dans son propre pays (comme l’ensemble de la scène dont il est issu d’ailleurs).

GOJIRA est un groupe de death metal ; un sous-genre basé sur un rythme très rapide, un son très lourd et menaçant, une haute technicité dans l’exécution et une imagerie généralement morbide et/ou sataniste. Si les landais reprennent effectivement dans leur musique les codes inhérents au genre (on sent notamment l’influence de cadors comme MORBID ANGEL ou DEATH par exemple), ils ont aussi su intégrer d’autres éléments à leurs compositions.
Ainsi comme les Suédois de MESHUGGAH, ils truffent leurs morceaux de polyrythmies complexes, assuré par le batteur Mario DUPLANTIER (considéré par ses pairs comme l’un des meilleurs en activité). A l’instar de groupes comme TOOL ou NEUROSIS, on sent une prépondérance du songwriting sur la technicité pure, favorisant l’intégration d’éléments progressifs et atmosphériques. Enfin, le discours tenu par le groupe diverge totalement des canons du genre, axant leurs paroles sur une vision philosophique de l’évolution de l’humanité et la défense de l’environnement. L’ensemble de ces éléments font de la musique de GOJIRA quelque chose d’unique au sein d’une scène où le clonage de groupes génériques est malheureusement devenu monnaie courante.

Ce son ne s’est pas forgé en un jour, et si du temps de « Terra Incognita » (2001) et « The Link » (2003) le groupe restait relativement « classique » dans sa musique ; l’album « From Mars To Sirius » sorti en 2005 a su amener un esprit onirique et planant dans un genre d’habitude plutôt chaotique et brutal.
A l’opposé, l’album suivant « The Way Of All Flesh » sorti en 2008 privilégiait plus l’expérimentation technique au détriment de la cohésion d’ensemble, rendant le tout inégal . Après, c’est par cet LP que le groupe accède à la notoriété internationale, la production plus léchée y ayant contribué. Mais qu’en est-il en 2012 ?

La réponse tient en un juste milieu : si GOJIRA semble perdurer dans la direction de l’album précédent quant à la production, on retrouve également un effort de songwriting et de cohérence qui avait fait défaut à « The Way Of All Flesh ». Ainsi, aucun titre ne semble être là par hasard ; et à l’instar de « From Mars To Sirius », l’ajout de mélodies mettant en avant une atmosphère mélancolique (à contrario de « FMTS » qui lui prônait l’onirisme) renforce la cohésion de l’ensemble, rendant « L’Enfant Sauvage » assez unique. Aucun des titres présents sur cet album ne pourrait se retrouver ailleurs.

Attention toutefois : cela reste un album de metal extrême, avec tout ce que cela implique en matière de tempos supersoniques et de dissonances saturées (« Planned Obsolescence », ou comment faire passer une batterie pour une foreuse industrielle).
Mais il se dégage de l’écoute une étonnante sensation de calme de prime abord assez antinomique avec la fureur de la musique joué ; comme ces couplets accrocheurs de la chanson « L’Enfant Sauvage », le refrain de « Mouth Of Kala » ou encore cet arpège entêtant accompagnant « The Gift Of Guilt ».
Enfin, l’album est parsemé de plans sortant totalement du cadre du death metal ; comme cet outro évoquant Ennio Morricone sur « Explosia » ou encore ce « The Fall » doomesque à souhait. Evidement, certains passages semblent avoir été déjà entendu ailleurs sur la discographie du groupe (le pinkfloydien « Born In Winter », qui ne dépareillerais pas sur « From Mars To Sirius ») ; mais n’est-ce pas le signe que le groupe a réussi à forgé son propre son ? En soit, c’est la preuve que les landais n’ont plus rien à prouver.

Fini les balbutiements des débuts. Fini la complexité envahissante de « The Way Of All Flesh ». GOJIRA sort en 2012 l’album le plus naturel qui soit. En ce sens, on peut parler d’une fin de cycle ; car avec « L’Enfant Sauvage », la bande des frères Duplantier assume son style et son statut en tant que groupe. C’est en effet un groupe qui sait quel est son identité et qui aborde ses compositions sans prises de têtes superflues. La marque des grands groupes en somme.
 
Line-up :
Joe Duplantier : chant, guitare
Christian Andreu : guitare
Jean-Michel Abadie : basse
Mario Duplantier : batterie

Tracklist :
01 : Explosia
02 : L’Enfant Sauvage
03 : The Axe
04 : Liquid Fire
05 : The Wild Healer
06 : Planned Obsolescence
07 : Mouth Of Kala
08 : The Gift Of Guilt
09 : Pain Is A Master
10 : Born In Winter
11 : The Fall

mardi 31 juillet 2012


Le Mont Saint-Michel,
l'immensité d'un monument
Edouardo SENETA

Le Mont Saint-Michel est un lieu intemporel et mystique, cette commune est située dans le département de la Manche et de la région Basse-Normandie. Bon nombre d’histoires et de légendes contribuent et entretiennent la grandeur de cet îlot rocheux où s’élève une abbaye consacré à Saint-Michel.

Le Mont Saint-Michel fut un monument convoité par les bretons et les normands. En 867, le traité de Compiègne attribua l’Avranchin (Avranche et le Mont Saint-Michel) à la Bretagne, c’était le début de la période « bretonne » du Mont Saint-Michel. C’est Guillaume 1er de Normandie en 933 qui récupéra l’Avranchin aux bretons, en 1009 la frontière sud fut déplacée jusqu’au Couesnon, fleuve côtier dont l’embouchure marqua pendant des siècles la limite officielle entre la Normandie et la Bretagne. Un proverbe breton dit : « Le Couesnon dans sa folie a mis le Mont en Normandie, mais quand il reprendra raison, le Mont redeviendra breton ».

Le côté magique de cet îlot rocheux sera tout de même épargné par cette guerre fratricide pour s’octroyer l’exclusivité du site, le Mont Saint-Michel symbolise le combat entre deux forces, la lumière et l’obscurité, la dualité du bien et du mal.

Le temps n’a plus d’importance
C’est certes un lieu de pèlerinage, le Mont est un symbole religieux pour les catholiques, mais à la nuit tombée, lorsque vous arpentez ses rues pavées et sombres, vous n’êtes pas touchés par le symbole christique, non ! Ce qui vous frappe, c’est la plénitude du Mont Saint-Michel la nuit, loin des tumultes de la ville, déserté de tous les visiteurs et curieux de la journée, le Mont s’impose et devient un lieu de méditation, où le temps n’a plus d’importance, vous êtes dans l’instant présent.

Je ne suis pas religieux et je peine à croire en un dieu, le Mont Saint-Michel n’est pas destiné qu’aux pèlerins, il fait partie de ces merveilles du monde qu’il faut voir au moins une fois dans sa vie et comme dit Victor Hugo : « Le Mont Saint-Michel apparaît comme une chose sublime, une pyramide merveilleuse. »

Vincent TURBAN

 Gare de Bologne, 2 août 1980
Autopsie d’un massacre

L’un des attentats les plus sanglant du XXème siècle eut lieu en Italie, durant l’une des périodes les plus sombres de l’histoire contemporaine de ce pays, les Années de Plomb. Toute une suite d’évènements eurent lieu, dans des tentatives de déstabilisation du pouvoir de la démocratie italienne (attentat de la Piazza Fontana en 1969, enlèvement et assassinat du Président du Conseil Aldo Moro en 1978) mais le massacre de Bologne est le point d’orgue de l’horreur car des civils innocents payèrent de leur vie pour des desseins politiques.

Voici la chronologie des évènements…

En ce 2 août 1980, le ciel est au beau fixe, une atmosphère de vacances flotte à la gare de Bologne, plaque tournante du trafic ferroviaire pour les villégiatures sur la riviera Adriatique. En effet, les vacances débutent dans la péninsule italienne. Dans ce climat d’insouciance, personne ne se doute qu’un drame terrible va se dérouler. Dans la salle d’attente des 2e classe, une valise contenant un engin explosif composé de TNT, de T4 et de Compound B est placé sous une banquette sans que personne ne s’en aperçoive.

À 10h25, une violente déflagration secoue le bâtiment et détruit pratiquement tout l’édifice, le toit s’est effondré, et le train Ancona-Chiasso-Bâle qui attendait à quai est soufflé et partiellement détruit à cause de l’onde de choc.

En un instant, tout bascule dans le sordide, les survivants et les blessés plus ou moins graves, victimes d’éclats de verre et autres s’extraient tant bien que mal des décombres fumantes, la panique s’installe et un silence de plomb recouvre la station de Bologne.


Aux premières nouvelles, l’explosion serait due à l’explosion d’une chaudière. Les pompiers et les ambulances se dépêchent sur le lieu du carnage, des civils aident les secouristes à repérer et à sauver des vies au milieu d’un enchevêtrement de gravats et de tôles tordues.

Quelques heures après, un premier communiqué téléphonique anonyme, suivi d’un second est diffusé, l’attentat est revendiqué par les NAR (Nuclei Armati Rivoluzionari ou Noyaux Armés Révolutionnaires), groupuscule terroriste d’obédience néo-fasciste, actif depuis octobre 1977, ayant des connexions avec La Bande De La Magliana, financé par des hold-up et fondé par Valerio Fioravanti ex jeune espoir du cinéma italien. On apprendra par la suite que les Brigades Rouges ont aidé financièrement les NAR pour préparer l’attentat.

Dès lors, l’enquête s’oriente vers la piste la plus plausible (l’explosion accidentelle est très vite abandonnée car des débris d’explosifs sont retrouvés dans les décombres), celle du terrorisme noir et des milieux d’extrême droite, et le 26 août 1980 le Procureur de Bologne délivre environ une vingtaine de mandats d’arrêts à l’encontre des militants des NAR, parmi lesquels figurent Roberto Fiore et Massimo Morsello.

1981, 1 an après les faits, Le général Pietro Musumeci, n°2 du SISMI (Servizio per le informazioni e la sicurezza militare) ancien nom des services secrets militaires italiens, est accusé de falsification de preuves pour avoir chargé à tort 2 leaders d’extrême droite appartenant au groupe Terza Posizione, alors en exil en Angleterre Gabriele Adinolfi et Roberto Fiore. Le dossier restera ouvert pendant 15 ans, grâce à la persévérance des familles des victimes, ce qui permettra au procès d’aller à son terme.


 

Le 23 novembre 1995, les sentences prononcées par la cour de cassation de Bologne sont les suivantes :

- Condamnation à perpétuité pour les exécuteurs de l’attentat (Valerio Fioravanti et Francesca Mambro qui continuent à clamer leur innocence) mais situation ubuesque, Fioravanti est libre depuis avril 2009 et Mambro, actuellement en liberté conditionnelle, sera libre fin 2013.

- Condamnation pour obstruction à l’enquête pour Licio Gelli (grand chef de la loge maçonnique P2), Francesco Pazienza, Pietro Musumeci et Giuseppe Belmonte du SISMI.

Notons que de nouvelles peines sont instaurées par la Cour d’assises de Bologne en juin 2000 :

- 9 ans de prison pour Massimo Carminati « Er Nazista » (militant des NAR et allié de la Bande De La Magliana). Ce dernier est en cavale après s’être échappé du dépôt du Tribunal de Rome en 1999.

- 4 ans et demi pour Federigo Mannuci Benincasa et Ivano Bongiovanni.

 

mardi 3 juillet 2012


Wattstax, le Woodstock noir ou la fierté du peuple afro-américain

Vincent Turban

À la suite de l’arrestation de 3 membres d’une même famille par la California Highway Patrol pour conduite dangereuse, des émeutes urbaines éclatent dans le quartier de Watts à Los Angeles, le 11 Août 1965. En 5 jours de violence on dénombre 34 morts, 1100 blessés, 4000 arrestations, 977 édifices détruits ainsi qu’une facture de 35  millions de dollars de dégâts.


 Le 20 Août 1972, 100 000 personnes viennent commémorer le 7ème anniversaire de ces émeutes au sein du Los Angeles Coliseum. Flash-back sur cet événement musical unique immortalisé sur pellicule par le réalisateur Mel Stuart.


Les origines du festival


Organisé par le label Stax Records, Wattstax est une retranscription de témoignages  des habitants du quartier de Watts suite aux évènements de 1965, dont ils furent les témoins directs. Pendant 6 heures et ce dans une ambiance bon enfant, la crème de la musique soul et funk de Memphis défile sur scène. Ainsi des noms comme Rufus Thomas, the Bar-Kays, le bluesman Albert King ou Isaac Hayes (sa prestation est le paroxysme de ce festival) délivrent des concerts d’anthologie.

 
Autre moment de légende, l’intervention du Révérend Jesse Jackson qui délivra un discours militant, haranguant la foule et arrivant  à  faire lever
100 000 spectateurs pour réciter la Litanie Black le poing en l’air, signe de ralliement du Black Power.
Parallèlement aux passages musicaux, ce documentaire met en lumière la communauté afro-américaine du ghetto de Watts au travers de témoignages sur les attentes, les angoisses et le futur en cette année 1972. On dénote au cours de ces interventions que la situation en l’espace de 40 ans n’a pas spécialement changé au sein de la Communauté, au pays de l’Oncle Sam. La paupérisation, la ségrégation sont  le pain quotidien des afro-américains même si Barack Obama est au pouvoir.

Notons aussi les interventions hilarantes du comique Richard Pryor qui tourne en dérision des situations vécues, ainsi que la première apparition du comédien Ted Lange (Le barman Isaac Washington de la série La Croisière s’amuse)

Sorti en 1973, Wattstax est un documentaire à voir ou à  découvrir pour comprendre toute la quintessence et toute la puissance de la culture afro- américaine des années 60-70. Un seul bémol cependant, les extraits musicaux de bonne qualité certes mais tronqués. Il aurait été préférable de les laisser dans leur intégralité au moment du montage.