Billet d'humeur
A quel jeu joue Nicolas
Sarkozy ?
Karl Masse
Le Président sortant veut transformer la France en champ de bataille, et
n’est plus porteur aujourd’hui d’aucun projet politique, mais seulement de
l’envie de gagner, coûte que coûte. Derrière ses discours de rassemblement
national, il a fait de cette élection une affaire personnelle.
Quel changement ! A écouter
ou relire les déclarations de Nicolas Sarkozy en 2007, lors de la précédente
campagne présidentielle, on pourrait imaginer que ce n’est pas le même homme
qui s’exprime aujourd’hui ! Lui si aimable avec Ségolène Royal entre les
deux tours, empli de respect pour elle, lui demandant de rester calme pendant
le débat, lui si proche des jeunes de banlieue, parce que lui aussi immigré,
« sang mêlé » comme il le déclarait. Lui le candidat des pauvres et
des ouvriers !
Que dit-il aujourd’hui ?
Qu’il va exploser son adversaire, que le Front National est compatible avec la
République, qu’il y a des vrais travailleurs et les autres, que les immigrés
n’ont plus droit de cité chez nous ! Cherchez le programme, cherchez les
valeurs républicaines dans ce galimatias et derrière cette brutalité.
L’élection présidentielle mérite
mieux que ces invectives de cour de récréation, à savoir qui est le plus fort,
qui pisse plus loin que l’autre ! Comme si la force était le gage d’une
capacité à gouverner, et en oubliant que
la force génère très souvent de la violence. Rappelons-nous Gandhi et Nelson
Mandela, qui ont choisi une autre voie pour libérer leur pays. Pissaient-ils
plus loin que tous ces militaires armés qui rêvaient de leur faire la
peau ? D’ailleurs, se sont-ils un jour poser cette question ?
Nicolas Sarkozy n’a à priori rien
à proposer, sauf un rapport de force à son adversaire, qu’il veut multiplier
par deux, puis par trois débats, comme si les français avaient encore besoin de
leçons sur les forces et faiblesses des programmes des uns et des autres, n’étaient
pas capable de tirer des enseignements du quinquennat qui s’achève, comme s’ils
avaient voté sans savoir ! Pour qui les prend-il, ces français dont il
veut encore être le représentant ? N’a-t-il pas entendu la sanction sans
appel, premier candidat sortant de la 5è république à ne pas être en tête au
premier tour ? Est-il crédible en rassembleur ? Essaie-t-il de les unir
derrière lui, ou cherche-t-il seulement des électeurs, ceux du Front National plus particulièrement, en
jouant sur la peur, en activant la haine de l’autre, et sûrement pas la
solidarité. Les observateurs étrangers sont choqués par la posture de celui
qu’il surnomme déjà Nicolas Le Pen. Ils ont honte pour nous. A quoi ressemblerait la France qui élirait un tel Président ?
Derrière l’invitation à ces
combats de coqs, qu’y a-t-il ? Le bilan de Nicolas Sarkozy : ses
cadeaux aux riches, avec lesquels il a
fêté son élection, en oubliant tous ceux auxquels il avait promis un avenir
radieux, l’augmentation du chômage, les coups de pied dans le pacte social
français, construit de haute lutte après la 2è guerre mondiale, la
précarisation de l’industrie et du
secteur social, l’ultralibéralisme financier. D’aucuns opposeront à cette liste
non exhaustive la « crise », qui a touché tous les pays. Soit, il ne
sert à rien de le nier, mais il ne faut pas oublier non plus que des instituts
d’analyse très bien informés ont noté que la dette française, sans les excès du
président, serait inférieure de 30 % à ce qu’elle est aujourd’hui. Donc notre
président, en plus d’avoir été injuste et d’avoir divisé les français, a mal
géré la France ! Que promet-il aujourd’hui ? Avant le premier tour,
on eut parfois l’impression qu’il empruntait à Olivier Besancenot, fustigeant
la finance, qui allait voir ce qu’elle allait voir, avec ses petits bras
musclés. Aujourd’hui, c’est à Marine Le Pen qu’il veut voler des électeurs.
Comprenne qui pourra !
La droite suit son champion comme
elle peut, dans ses dérapages plus ou moins contrôlés, mais des voix
divergentes commencent à se faire entendre. Elles seront tenus pour
responsables en cas de défaite, et clouer au pilori, à moins que tous ceux qui
font encore semblant d’y croire et d’adhérer à cette droitisation en règle ne
prennent leur défense. En tout cas, la
bagarre actuelle continuera après le 6 mai, et des têtes tomberont si les
suffrages ne sont pas au rendez-vous. La violence ne disparaîtra pas comme
cela, mais elle changera de cibles. Il ne fera pas bon être à l’UMP à ce
moment-là ! Surtout que, tapie dans l’ombre, c’est une autre droite qui
essaiera de profiter du terreau planté par le Président encore en place. Il
faudra rester vigilant.
Aujourd’hui, un système est en
train de se déliter, de montrer ses limites, celui du capitalisme financier
débridé et ultralibéral. Aux deux options proposées aux français, celle d’un
fatalisme devant une force apparemment indestructible, dont on doit accepter le
joug, parce que rien ne peut changer, et celle d’un combat à mener, qui sera
très dur, contre les forces de l’argent, avec tous les risques que cela
comporte, je crois ne pas avoir besoin de vous préciser mon choix.
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